EMI - Voir ce qu'il y a après la mort
Vous avez dit expérience de mort imminente? Certaines personnes ayant frôlé la mort rapportent qu'au moment fatidique, elles sont "sorties" de leur corps et ont vu leur vie défile; un tunnel blanc, voir des êtres chers disparus, ont pu leur apparaître...
Voir ce qu'il y a après la mort. La manifestation d'un état de conscience altérée.
Alors que la vie s'apprête à la quitter, certaines personnes ont l'impression de se détacher de leur corps. Au même instant leur apparaît un tunnel lumineux, dans lequel leurs proches disparus leur recommandent de ne pas entrer... Cette étrange expérience, dite de "mort imminente" (EMI), est bien ancrée dans l'imaginaire collectif. Parmi ceux finalement sauvés in extremis, nombreux témoignent comme d'un aperçu de l'au-delà.
Sans surprise, les visions et sensations qui accompagnent ce moment où le corps hésite à la frontière entre la vie et la mort ont nourri mythes et légendes, suggérant une passerelle possible entre les deux états.
Pour les chercheurs, si passerelle il y a, c'est une meilleure compréhension du cerveau humain. Car pour eux, l'expérience de mort imminente n'est que la manifestation d'un fonctionnement cérébral inusuel, dit l'état de conscience altérée". Et ils ont des théories pour chacun des aspects qui composent cette expérience.
Jusqu'à 39% des sujets concernés
Ainsi, derrière les tunnels lumineux et possibles hallucinations, les perturbations du systèmes limbiques (amygdale, hippocampe, etc.) et des cortex préfrontaux et temporaux se sont imposées comme des responsables potentiels sérieux, étant donné l'implication de ces régions cérébrales dans la mémoire, les émotions ou le comportement.
Autres candidats possibles: les sécrétions de neurotransmetteurs (dopamine, sérotonine...) et autres endorphines et opioÏdes, chaotiques quand le corps livre son ultime bataille, ou bien la modification des gaz sanguins (manque d'oxygène et/ou hausse de dioxyde de carbone). Toutefois, la plupart de ces explications n'ont pas encore été prouvées expérimentalement.
Si son origine biologique reste incertaine, d'autres travaux éclairent néanmoins la réalité inscontestable de l'expérience - pour ceux qui la vivent...
Fin 2014, Sam Parnia, de l'université d'Etat de New York, à Stony Brook, a publié le plus large panel de témoignages recensés en milieu hospitalier. Le médecin, spécialiste reconnu du domaine, a lui-même été surpris. Alors qu'on parle généralement de 10 à 20% de personnes concernées par une EMI, il découvre que 39ù des patients interrogés décrivent une "sensation de conscience", mais sans toujours en conserver de souvenirs explicite". Il met également au jour le volet sombre de l'expérience: sentiment de peur, persécution...
Pour les personnes qui sont "revenues", le ressenti est fort et bien réel. Plusieurs travaux, dont ceux menés en 2013 par la psychologue Marie Thonnard, à l'université de Liège, concluent que "les souvenirs de cette expérience ne peuvent être vus comme ceux d'évènements purement imaginaires. Au contraire, leur origine physiologiques pourrait les amener à être vraiment perçus, bien que non réellement vécus."
Ce qui est désormais certain, c'est que même mourant, le cerveau est actif. Jimo Borjigin, neurologue à l'université du Michigan, a récemment montré, chez le rat, qu'il peut être très actif dans les trente secondes qui suivent un arrêt cardiaque. Rendant ainsi plausible l'idée que les expériences de mort imminente peuvent avoir lieu juste avant ou juste après cet épisode extrême... jusqu'à ce que le coeur reparte.
Sans compter qu'activité cérébrale indétectable ne veut pas dire absente. Aussi Sam Parnia note-t-il dans sa dernière étude que dans certains cas, "la conscience semble subsister pendant une durée de trois minutes sans battement de coeur." L'hypothèse est audacieuse, et le médecin dit avoir besoin de plus de cas pour la confirmer.
Tous les psécialistes s'accordent en revanche sur un point: les sujets d'une expérience de mort imminente vivent bien quelque chose d'extraordinaire alors qu'ils sont aux portes de la mort.
Source: Science & Vie n°1175, août 2015.